Je me john kennedy toole, ou je..? | 31 octobre 2012

Je n’écris pas pour les morts, pas plus que je ne m’informe sur les morts, France 2/TF1 20h00. ça non, je ne m’escrime pas non plus avec les morts des lettres, les scribouillards à minerves velues, aux ventres repus d’une suffisance tournée vers le marché du livre. L’index tremblant, je tourne les pages numériques et fais défiler sous mes yeux la nouvelle d’un jeune auteur génial mais conchie par tous les « pignons-sur-rue » de l’édition papier. Un jour, ce jeune rageur est tombé nez à nez avec un dilemme : « Ou je me john kennedy toole, ou je me laisse une chance d’écrire toutes ces dunes qui m’envahissent l’esprit… ». Ainsi, et aussi exténué qu’un ours à la fin de son hibernation, le valeureux est parvenu à diffuser son bijou littéraire. Je suis là, bien sur moi, dans mon Motel de province accolé à la zone commerciale anonyme d’une petite ville morte trempée de pluie et je lis cet auteur, je savoure sa fulgurance, la puissance célinienne de son écriture et la folie « ellisienne » de ses personnages. J’en jouis avec le bide, j’en savoure chaque tournure, heureux de pas être passé à côté de ce coup de génie. En d’autres temps, j’aurais nécessairement attendu des années pour voir ses écrits débouler dans ma piaule. Ici, la librairie ne livre que les lourds succès commerciaux et quelques navets locaux. Mais rien des talents naissants, même plus un fanzine littéraire balancé à trois exemplaires entre les cahiers Clairefontaine et le Télé 7 jours. Ma liseuse – terme aussi vieillard que ma défunte grand-mère – posée sur les cuisses, j’ai encore une trentaine de futurs monstres sacrés téléchargés de la littérature…

Andy Vérol

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