Les livres sont des Zeppelins allemands qui brûlent...



Premières lignes d'un texte de commande par une grande revue française. A paraître en février 2015, si le texte fait l'affaire bien sûr!


J'entends à la radio que c'est le grand jour. Je plie le lit et le cale façon canapé dans le coin du studio. Des livres déments débutent leur danse des ombres contre le mur nord-est de la pièce: le jour soleil voilé vient de se lever. Ma bouche pâteuse, mes reins claqués par les abus bateau d'alcool, les rêves de plage face à la mer, de frigo en parfait état de marche, d'un crâne chevelu, encore perclus d'une toison somptueuse. Les ans. Le passé. Les ans où on lisait pour s'enrichir, pour combattre, pour s'élever. Sont si loin. 

Le trône popo est l'ami des fesses, le trône truand qui offre un passage privilégié vers l'abyssale autoroute d'eaux sales. Si seulement je pouvais sortir comme avant, sans le masque, sans les gants, sans la combi brûlante et collante. Simplement faire tchoui tchoui avec les talons des tongs, le canon de mon chibre dans le bermuda divin, dévié par le maillot de bain à filet. Quand je passerai devant les deux humanoïdes gardés à vous devant la porte du store, je ferai signe de l'index, me laissant scanner comme un vulgaire pot de yaourt en promotion.

"Votre attention s'il vous plait! Pour les concitoyens désireux de remonter leur moral égratigné, vous pouvez vous présenter au stadium Solarium pour la modique somme de Cent Cent drollars! Attention cette promotion prendra fin comme les pommes aux alentours de 22 heures, heures de Chicago, de Palace Hôtel et de Central Chienne. Nous offrons le colis saveur, les baskets en bambou ainsi que les registres de décès des proches de l'année en cours. Courez! Venez! Seuls les 10 000 premiers pourront en bénéficier!"

Une gravure de chien dans l'abribus. Des jambes longues comme des boas constrictor Imperator d'une shemale arabo-chinoise sous mes yeux vitrés sombres par mes lunettes de protection. "Vous n'arriverez jamais avant moi. Je ferai l'amour au soleil quand vous serez encore en train de vous vider dans vos combis à l'entrée ouest. Hue, han, des petits pchuiiiit". 

Il m'est impossible d'engager la conversation. Tenter de draguer une telle créature, c'est risquer de verdir dans le terreau de son cul béant sous la surveillance maniaque des généraux de la mégapole. Et pourtant, ce n'est pas l'envie qui me manque. Je fais des droite-gauche, gauche-droite, mains en l'air en imitant des cris de chats en rut. Personne n'y prête attention. Un temps. Des tuiles. Des torrents d'heures à tutoyer l'ennui et la neurasthénie. 

A suivre? 

Léonel Houssam


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