Il me considère comme un poste de radio





18 juillet 2011: et demain je donne du son en hurlant dans l'eau glacé de la Manche. La Manche, mais qui a donné ce nom bordel? Je ne peux pas dire à l'enfant que cette mer-là s'appelle comme ça. Il va péter un plomb le petit. Je lui enfile ses chaussettes. Il sourit bêtement. Un petit lémurien portant des moufles comme des gants de boxer aux poignets cassés. Cramé. J'enfile ses chaussures aussi. Il me touche le visage. Je suis un sac de terreau, un monticule de mousses humides. Lorsque je lui parle, il me considère comme un poste de radio, ou cette voix synthétique dite par un ordinateur-joujou pour marmot. Verrue plantaire. Faudrait que je l'emmène chez le médecin. Sans couverture sociale, sans "mandat", que puis-je faire?




19 juillet 2011: Vulgaire nuit. Embrasures soudées. Je ne parviens plus à terminer un seul roman. Je ne m'intéresse plus qu'au gosse, ses petites obsessions, cette façon d'accaparer chacun de mes instants, de sucer toute mon existence, de décider de mon emploi du temps, de mes programmes, de ma façon de me mouvoir dans l'espace, dans les rues, de rythmer chaque phase du jour et contraindre mes instants assis sur le trône des chiottes. Il peut se mettre à crier, ou bien à se casser la gueule, se cogner dans un coin, jouer avec une prise électrique, baver partout, vomir dans ma sacoche... Il est le chef d'orchestre, le parasite qui s'adapte, qui vampirise... Il est la plage de galets sous les pieds nus, le tic tac permanent dans une maison totalement silencieuse.

Léonel Houssam

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