Un cran d'arrêt à la main, je fais jaillir la lame







7 août 2011: en éteignant la télé, je suis resté avec mon sentiment d'insécurité un peu comme on devient glauque après avoir joui trop vite. Une vitre est ouverte, l'enfant et moi entendons des bribes d'apocalypse...


8 août 2011: l'enfant est resté le visage collé à la fenêtre de la chambre. Il semblait regarder tomber la neige d'été. Il pleurait parfois et chuchotait "j'veux maman, j'veux ma maman ". Je le regardais en fumant, sans rien dire, comme s'il était la neige d'été qui tombait.


9 août 2011: ils n'auront rien de moi. J'ai pas de portable, je paie en liquide. Je n'existe pas dans le monde connecté. En allant acheter des clopes au village, je me suis arrêté pour boire des demis de bon matin. Et j'ai vu Mimou qui mimait les babines d'un dogue français. En revenant à la chambre, l'enfant barbotait dans les draps froissés de mon lit. Je lui ai fait une grimace avant de mettre plus de son sur la télé. Il fait beau. Je sens l'air chaud de l'extrême sud.


10 août 2011: le matelas est gondolé, je suis bourré, béat d'admiration pour un type qui réussit à lutter contre les courants violents d'un fleuve en crue. Un cran d'arrêt à la main, je fais jaillir la lame, perce l'air, lime les volutes de fumée de ma clope far-West. La porte est secouée par les vents de plus en plus agressifs venus de Venisua, la cité des thanatopracteurs venimeux. Une tourte de viande faisande sur la table de nuit. L'enfant a lâché un pet, a ri et s'est remis à la fabrication d'un château hideux en Lego, grimé en grenouille verte.


11 août 2011: ses petits pieds ont effleuré l'eau glacée. Le chien, la chtouille, les chatouilles, la glaciation en plein mois d'août, la route gelée traçant sur l'océan figé. L'enfant se blinde le bide avec des Muffins pendant que j'écoute l'raggamuffin à la radio. J'ai la décapotable, la morve au nez en stalactite, la joie au cœur, on chante, on chouine, on a hâte d'arriver. "A l'extrême-nord, il y a des hommes géants aux yeux blancs, très gentils, très rustres, très voraces, ils saccagent ceux qui voudraient importer la mal des millions-morts, la 3ème guerre mondiale totale économique. Ils n'ont pas d'armes, ils ont une psyché géniale, monstrueuse, géante comme une nébuleuse lointaine!" On s'arrête à un Mac Do. On y mange des steaks de métastases produites en France entre deux tranches de pain au sarrasin. C'est bien. On bulle et on bénie le chauffage des lieux, le peu de clientèle, la télé chaîne info en boucle. On est bien, on est encore un peu en Occident avant de bifurquer vers l'ailleurs. TU AS DES PIEDS POUR MARCHER SUR LES GENOUX!

Léonel Houssam


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