De la viande molle gorgée d'excitation

Crédit photo: Yentel Sanstitre


Bertrand sort de sa gueule de bois pour déblatérer encore, à poil sur le matelas trempé moisi, il fait des gestes désordonnés avec ses longs bras aux muscles saillants.
La lueur de la bougie dévoile un visage de moitié crispé par la colère et la souffrance. Son sexe s'écoule long sur sa cuisse droite, serpent mort qu'il frappe violemment avec la paume de sa main:
"Mais c'est juste ça, c'est simplement ça ! La bite ! Elles disent qu'on pense qu'avec ça, c'est faux ! On pense avec la terreur des nuits, des coups de queue qu'on foirerait juste au bord d'un rendez-vous galant. Tous ces bâtards de militaires nous tirent dessus parce qu'ils ont une bite ?! Non ils le font parce qu'ils ont une femme, une copine, parce qu'ils pensent qu'ils vont les défendre, les protéger ! Et elles demandent que ça ! Que le Jules fasse la basse besogne, qu'il soit une bête féroce pour protéger leurs frêles corps tremblant de peur! Ils le font ! Ils butent, ils battent, ils combattent, ils gagnent des diplômes, du pouvoir, des territoires, des océans pour leur femme, leur moitié ou même pour cette pute pas trop chère qui a pris le temps d'écouter leurs lamentations après un head-fucking à moins de vingt billets ! Des bulles d'air dans la tête, des papillons morts dans le ventre mais rien d'autre dans la bite que du sang, des veines, de la viande molle gorgée d'excitation ! Rien ! Pas même un message en mors entre le gland et le cerveau ! Rien... Juste la compagne, la mère des enfants, la pute ou la future petite amie. Ils tuent pour ça, ils cassent leurs cerveaux pour ça, ils boivent, ils se piquent, ils se tuent dans des accidents de bagnole pour ça ! Juste pour ça. Leur bite est juste une excroissance molle qui part en feu aussi légitimement qu'une vulve explose de fureur ! J'en ai marre. Je vais tuer tout le monde. Je vais détruire notre République et je le ferai pas parce que ma bite l'a commandée mais parce que je n'ai aucune femme sur qui compter "
Il enfile son jean blanc. Torse nu, sans chaussures, il monte les marches trois par trois, attrape son fusil d'assaut et se plante au milieu de la rue, l'arme soulevée vers le ciel... Les soldats ennemis ajustent leurs viseurs, index prêts à déclencher le tir. D'une voix rauque et spectrale, Bertrand leur balance:
"Butez moi puisque vos salopes de femmes et votre chienne de nation vous l'ordonnent"

Extrait de « Notre République ", en cours d'écriture.

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