Saga Africa de Yannick Noah est-elle une chanson semi-raciste ?


Coupe Davis - Rétro 1991 : la Saga Africa de Noah à Lyon - Photo : @DavisCup

La chanson "Saga Africa" de Yannick Noah est-elle une oeuvre semi-raciste ? Je laisse le comité de ceux qui, soi-disant de gauche, ont remis la race au cœur de tous les débats de notre société.

Pourquoi semi-raciste? Et bien parce que Yannickounet-de-tous-les-français a une maman blanche et un papa noir (joueur de foot à l'équipe de Sedan dans les Ardennes. On n'était pas peu fiers de lui quand j'étais petit dans mon milieu de cis-genre-blanc-prolo-raciste-homophobe et j'en passe). Saga Africa comporte tous les clichés africains à la sauce Michel Leeb: accent caricatural de la part d'un pur français imitant au mieux son papa (sans certitude que celui-ci en ait eu un), au pire des noirs africains revus à la sauce tube franchouillard, paroles ultra-clichesques "ambiance de la blllousse" et public à 99% constitué de franchouillards blancs tendance "suspects de voter RN, ça s'voit rien qu'à leur gueule".

Semi-raciste, car notre "vainqueur de Roland Garros" est tout de même à "moitié" blanc. La question est: quand on est de "race noire" ou de "race blanche", ou autre... Quand on est un peu les deux, qui doit-on privilégier? Dans une soirée de blancs, on dit qu'on est blanc? Dans une soirée de noirs, on dit qu'on est noir? Mais alors?

On dirait donc de "race jaune" pour des asiatiques? De "race rouge" pour les indiens d'Amérique? Ou bien, reprenons les termes à "l'amé'ouicane": de "race caucasienne", de "race noire"... J'essaie de comprendre hein? Je suis un peu perdu. Je vis en banlieue, et le terme de race, jusqu'à pas si longtemps, était un terme abject porté par les plus fanatiques d'extrême-droite. Et voilà que sous le coup d'une forme d'anglo-saxonnisation et une hollywoodisanisation et un abêtissement général, ceux qui se disent de gauche ont commencé à utiliser ce terme et pire encore, à hiérarchiser les coupables et les victimes en fonction de leurs origines, de leur couleur de peau et de l'Histoire de leurs soi-disant ancêtres.

Moi j'en étais resté à quelque chose de fort simple. Tous ceux que je connais, amis, proches, connaissances, noirs, blancs, verts, rouges, nous acceptions nos origines et luttions contre ce vieux racisme rance qui classait les êtres humains en qualifiant leur "race" et en distinguant leur niveau social, culturel, intellectuel et professionnel à travers leur couleur de peau et leurs origines. Ils étaient nombreux et ils le sont encore.

Mais quand il s'agit de parler d'amalgame, de certains soi-disant gens de gauche -et blancs- se posent là. Le plus écœurant chez eux, c'est quand ils acceptent de porter les crimes de leurs ancêtres blancs... Leurs ancêtres... Y compris ceux qui sont d'origine polonaise, irlandaise, suisse, etc. Qu'est-ce que c'est que cette connerie?

C'est à travers les Sciences Humaines que nous étudions le passé, que nous l'interprétons et le réinterprétons. Et ça a un nom: l'Histoire. Désormais, cette discipline qui a été imprégnée par de nombreux courants (positiviste, romantique, marxiste, royaliste, souverainiste et j'en passe) est le joujou de crétins qui nous expliquent qu'on a trop esquivé certains sujets en Histoire. C'est vraiment être un inculte et un cancre de dire cela. C'est aussi une affreuse connerie. C'est un peu comme dire que Rimbaud, de son vivant, était un des plus grands poètes de son temps. Rimbaud, de son temps, était inconnu de ses contemporains, un poète anonyme uniquement connu dans les milieux littéraires très très très confidentiels. Bref. Nous sommes aussi à l'heure où on relit l'Histoire à sa sauce sans avoir lu plus de deux bouquins d'Historiens solides.

Ces imbéciles qui instrumentalisent l'Histoire tout en pointant du doigt leurs "ennemis qui instrumentalisent l'Histoire" nous ramènent donc sur un plateau d'argent le mot "race". Qu'ils se penchent sur la question... A l'heure où l'on commence à différencier chacun via des catégories ethniques avec le séquençage de l'ADN, ils devraient vite revoir leur copie. Car le distinguo racial qu'ils font, en hiérarchisant les "victimes" en fonction de leurs "races", ils ne font que remettre à l'ordre du jour un concept qui a mené à la Shoah ou même au génocide rwandais. Car de victime, on passe vite à coupable voire bourreau. C'est le fondement même de la frustration d'une partie des allemands après 1918 qui, plongés dans l'humiliation du Traité de Versailles, et dans une misère affreuse, se sont sentis victimes, jusqu'au point d'en reconnaître la "race" ultime qui les aurait spoliés et placés dans cette posture.

Au même titre que certains rappellent le passé esclavagiste de l'Europe (et c'est un fait avéré car étudié, décortiqué, analysé par pléthore d'historiens blancs, noirs, verts, bleus) pour expliquer qu'un "blanc" doit porter les stigmates de sa culpabilité éternelle, ils pourraient, s'ils ne hiérarchisaient pas les races, s'intéresser à l'esclavagisme de la société arabo-musulmane qui ne fut pas en reste sur le sujet, mais aussi sur les sociétés noires qui "esclavagisaient" ceux qu'ils avaient attrapés lors de guerres diverses et variées. Ils pourraient jeter un œil en Asie également...

Ils devraient aussi regarder où se situe la plus forte concentration d'esclaves à l'heure actuelle: en Afrique noire, en Inde, et dans certaines régions d'Asie. En hiérarchisant les races, pour distinguer l'une supérieure à une autre, ou l'une plus coupable ou plus victime que l'autre, on crée le terreau qui légitime la confrontation. Celui qui se sent pointé du doigt a deux postures possibles: soit se soumettre, soit se défendre (à tort ou à raison) et ça ne mène qu'à une chose: la destruction et la mort.

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