Rien de mieux qu'un cancer pour réussir un régime. Journul intime 57.


«Rien de mieux qu'un cancer pour réussir un régime.  »

Ainsi me parla cette très proche qui fut emportée par le crabe quelques semaines plus tard. Elle avait le regard moqueur, cette petite lumière scintillante dans les yeux. Ses yeux que je ne revis plus jamais, sauf peut-être leur forme oblongue derrière ses paupières cireuses soudées par l'évaporation de l'âme.

Elle était une disparue d'une longue série d'autres décédés qui survinrent sans survivre hein entre 2008 et aujourd'hui.

J'étais encore Andy Vérol, empêtré dans un désir de mort pataugeant dans une marinade d'alcool, de rage et de haine de moi-même.

Je lâchais les chiens, la meute que je dirigeais sur les réseaux sociaux. C'était tellement puissant, c'était tellement suicidaire et sans limite que ça excitait des dizaines de milliers de personnes. Mes posts, mes publications sur mon blog de l'époque généraient jusqu'à 800 000 visites par mois (si si c'est vrai). J'en suis loin aujourd'hui avec 10 à 12000 visites mensuelles.

Ça m'a permis de sortir mes premiers livres, excitant les  « moches » , ceux de l'édition, ceux de la presse télé, radio et papelard. Tout le monde s'agitait. Je dévalais la pente jusqu'à la falaise. Tout le monde voulait que j'y aille plus vite et plus fort. Dans leurs intérieurs cérébraux habités par la lâcheté, les "fans" qui se chiaient dans le benne étaient prêts à me laisser exploser en vol pour une vieille giclette de mouille de chatte serrée comme une frustration ou de sperme de bite semi-molle dans une main moite et aussi puissante qu'une viande de moule.

Ma souffrance, ma perdition n'étaient autres que l'esclave qu'ils regardaient se faire déchiqueter par quinze lions affamés dans l'arène autour de laquelle ils étaient assis en bouffant des cornets de pop-corn. La corne des connes, des cocus conspuant le combattant croupissant dans sa propre merde. La molle moulant sur la petite colline de leurs pubis proéminents.

Ils pouvaient être des milliers par dizaines ou centaines mais je mourais, emporté par ces meurtres en série du destin qui me mettaient à l'épreuve.

On ne survit pas de la mort de ceux qui dessinent la carte de notre royaume intime. On crève avec.

Je suis donc mort. Mon corps est resté sur Terre, ainsi que ma bouche qui bavarde, mais aussi mes doigts qui écrivent. Pourtant la merde humaine que je détestais tant depuis l'enfance est devenue mon spectacle à moi. Des esclaves bouffés par les choix de leur Maître. Car il n'y en a qu'Un. Quoiqu'ils en pensent. Si on peut seulement leur reconnaître cette capacité à penser.

Mon blog a péréclité. Jusqu'à tomber à quelques centaines de visites mensuelles. J'adore les statistiques, les chiffres, leur analyse et les cartes géographiques autant que l'astronomie. Ça me projette dans les mondes au-delà du monde.

Quoiqu'il en soit, je n'ai pas perdu l'énergie que l'on m'offre. J'ai simplement décidé au fil des années de ne plus la consacrer à communiquer avec l'humanité. À quoi bon plaire à une espèce si prévisible qui dans le même temps découvre qu'elle n'est pas seule dans l'univers tout en continuant à ne rêver que d'une chose : baiser comme des animaux, se considérer comme un animal, se cracher à la gueule et désireuse de se sauver elle-même et tout ce qui l'entoure.

Je n'ai pas beaucoup de talent. Mais j'en ai un que peu me reconnaissent aujourd'hui : je sais que nous vivons notre extinction.

Et figurez-vous que c'est la chose jubilatoire que je rêvais de vivre quand je me suicidais à feu doux.

Ce rêve, face à la mort qui n'est qu'une expérience totalement ultime tout comme la naissance, c'était que ma disparition soit vécue avec la totalité de mon espèce. Et je suis en train de le vivre...


 

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