A chaque décès d’un proche, je regarde le compteur

 



A chaque décès d’un proche, je regarde le compteur de la population française qui augmente. Entre chaque mort, trois cents ou quatre cents ou six cents mille vies supplémentaires sur le territoire des disparus. Peu à peu mon pays intérieur disparaît, rongé par le temps, la vieillesse, les espoirs teintés de lassitude. Je ne me plains pas, je sais encore attraper une mouche au vol et la broyer entre mes dents. Je n’ai jamais su plongé et je ne compte pas m’y mettre. Je n’ai tué que des petites bêtes, et la conduite de projet n’a plus de secret pour moi. Ma posture anticapitaliste n’a fait fléchir aucun système, aucune société, aucune tête dirigeante. Mais je sais parfaitement retirer la pellicule protectrice du goulot d’un litre de lait, je sais aussi ouvrir une bouteille de vin. Je sais aussi retenir la peur irrationnelle qui saisit lors d’un réveil en sursaut… Je ne sais pourtant ni naître ni mourir. Je ne sais pas supporter la douleur et je n’ai pas de héros avéré. Qui suis-je à part être la même chose que vous ? 

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