Ne pas attirer l’attention de l'ange de la mort

 

Dysto-Photographie


On déchire les cieux avec l'esprit, 

On détruit la terre avec les entrailles. 


Danse mon petit. Baise mon grand. Dans la pièce baignée dans la pénombre, les corps semblent des silhouettes de draps froissés ondulant au vent. L'odeur de viandes, les petits râles mêlés de plaisir et de douleur. Le musk des sueurs et des salives. Les sexes sont des charnières imbriquées. 


On lui donne enfin du papier et un stylo. Il en a assez de regarder par cette fenêtre qui n'existe pas. Pourtant, d’habitude il peut y scruter un chaos de corps qui l’apaise. Mais aujourd'hui, à l’intérieur du cachot de sa cervelle, il a beaucoup de mal à respirer. La seule idée de la vie lui donne la nausée ; quand il y pense, une rage monte en lui, lui coupe le souffle, lui donne des vertiges et l'oblige à s'allonger, tremblant et transpirant, sur son matelas plein de pisse en espérant ne pas attirer l’attention de l'ange de la mort. Il aime les chutes libres. Il écrit comme on se sert d'un sabre de guerrier, pour repousser les attaques incessantes des ennemis, les autres, les passants, les co-détenus qui à leur corps défendant ne sont pas mieux lotis que lui. Il n'a plus besoin de voir le ciel pour admirer la Lune, il n'a plus besoin de traverser la ville pour en supporter la puanteur et le brouhaha. 


Son esprit d'enfant est vissé sur son corps d'homme, ses membres n'obéissent qu'au temps qui passe tandis que son cerveau le pousse dans une course infernale et enivrante qui ne le mène nulle part. Rencontrer l'autre pour ne pas se sentir seul mais rencontrer un autre qui ne ferait pas partie de cette espèce de cinglés. Être avec un ou une autre d'une ascendance venue d'ailleurs. On lui a affirmé que ça n'existait pas, que ça ne pouvait pas exister. Pourtant, il est persuadé du contraire.  « Il y a bien quelques êtres sur cette Terre qui soient dotées d'une intelligence telle qu'on aurait envie de vivre et coucher avec eux non ?  » 


Le stylo troue le papier et le bois de cette petite table qui fait office de bureau. 


Les murs se mettent à trembler. On lui dit que tout ça n'est que le fruit de son imagination et d'une quelconque conséquence de ses psychoses. Il sait qu'il n'en est rien. Les murs cessent de trembler, le ciel sombre se substitue au plafond de sa geôle. Il est l'heure pour l'enfant doté de la puissance d'un homme de prendre son envol et découvrir cet autre qui mettra à mort sa solitude. 


Work in progress avec l’artiste Dysto-Photographie. 

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