Carnet non numéroté et non daté de Duno. Juste un intitulé et un morceau de texte: "Pas de rectif." | 24 octobre 2007


©Andy Vérol - Massif massif massif - Octobre 2007
"Tchaaaaaaaa okkkk! On a des roues motrices dans l'crânes! On va leur faire la peau, on va les peler les dépouiller! Okkkkk!" J'ai gueulé ça une fois, très fort dans le micro trempé par mes glaviots et ma salive. Ensuite une fille de 15 ans à peine s'est ruée sur moi, je lui ai tout arrachée devant la foule de bouseux venus se palucher en me zyeutant le chanter, leur hymne à la jeunesse! ça sentait la sueur sur cette gamine! ça sentait dans toute la salle. Et ça ne me plaisait pas. Je ne fais que ça, à longueur d'année, sentir les sueurs des publics, m'en foutre plein le nez, de leur cascades de sueurs mélangées. Ils pourront toujours penser que je suis détraqué, que je suis une pleureuse, mais franchement, je me fous de tous ces couillons en rut sur ma musique, ces petites salopes qui feraient honte à leurs pères... Notre succès dépasse les frontières françaises... Mais jouer en Belgique ou en Espagne, ou en Angleterre, ça me fait la même impression qu'un premier jour au camping... Dernière année des vacances scolaires. Depuis. Petits boulots. Rock. Boissons. Puis succès... Sexualité brutale... Solitude dans les chambres d'hôtel. Les petits savons qui puent dans la douche. Les gobelets dans le sachet plastique. Canal + à la télé. "Je ne connais pas l'amour car l'amour est trop lourd". J'écoutais les Béru dans les années 80. J'aimais Coluche. J'étais un gamin bien, qui aimait fumer du shit, se battre avec les Zulus, faire des crètes avec du savon, se friter avec le service d'ordre de la CGT. J'aimais les cuirs et les Teddy's. J'aimais aussi le lait glacé avec beaucoup de sucres en morceau. J'aimais pas les voitures. J'aimais pas le foot. J'adorais la branlette, les gros seins des vieilles femmes, les posters de mes copains, les pièces de théâtre dans lesquelles jouaient des copines qui me faisaient bander...
Les années 80. Les pantalons en stretch rouge et Mitterrand à gogo. Eurythmics, Francky goes to Hollywood... Les Stan Smiths. Les balivernes de gauche. Les premières filles arabes qu'on pouvait peloter dans les meetings de "Touche pas à mon pote". La vie. L'envie de péter le mur de Berlin, et la peur des bombes atomiques...
 Voilà un nouvel extrait des carnets de mon frère Duno, suicidé.
Duno & Andy Vérol

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