Le courage de dévaler des montagnes sans les déplacer | 23 novembre 2010

J'en ai donné du cœur pour birouter ma cervelle... J'avais ma main sur ta cuisse dans la Corsa, on supportait M, on baisait dans des B&B, on pleurait a l'aéroport, on s'oubliait, on avait le sourire sur la gueule... J'ai donné ma vie, tu as donné la tienne, on a même construit des remparts contre les bulldozers qui se sont érigés contre nous. Nous avions l'avenir dans nos paumes, pour finir paumés à cette seconde... Mais on ne meurt pas des erreurs et des lâchetés. On ne meurt même pas du gros doigt de Dieu qui s'acharne sur nous. En d'autres temps, on aurait gratté la terre avec les ongles et pondu mille enfants...
Nous voulions le beurre et les caddies pleins qui vont avec... On pensait que l'eau fraîche serait filtrée par une carafe Brita, et que l'amour serait la satisfaction de nos parents, de nos frigos remplis... On courrait contre nos angoisses, mais ces connes nous ont détruits...
J'avais le courage de dévaler des montagnes, je ne sais plus que descendre de mon lit comme un vieillard, la ville me mange, les rues me congèlent, les passants me recroquevillent...
Et je pense qu'un jour, juste avant de mourir, demain ou dans cent ans, nous saurons manger la vie à pleins crocs, extirpés de nos rêves débiles de "faire plaisir au chef pour garder mon emploi...". On sera sans doute déjà trop vieux pour avoir des enfants, mais encore assez jeunes pour ne jamais souhaiter mourir séparés...
La belle main se pose délicatement sur moi...
Il est cinq heures, je cours à l'entrepôt pour emballer des palettes...
Extrait du roman en cours: Le goût amer de l'amande

Photo: Kate Polin

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