Dans le cagibi des chaussures qu'on met plus





En ce moment je marche sur un fil. Je préfère mettre de la tek oldschool en boucle plutôt que de subir les bruits du quotidien. Je marche sur ce fil qui me mènera sur l'autre rive ou je serai emporté par le vide dans la rivière de lave. Putain c'est nul ce statut. Pour être plus clair, j'attends des réponses, je négocie des trucs, j'affine des machins... Je joue une partie compliquée qui peut tout aussi bien me mener dans une impasse qu'à un nouveau sentier escarpé capable de m'entraîner au sommet de la colline fraîche entourée de son étole de nuages effilochés. Les manuscrits se sont accumulés, mais désormais ils se doivent de prendre vie ou disparaître à jamais dans le cagibi des chaussures qu'on met plus, des sacs Auchan et Leclerc, des ordinateurs morts qu'on jette pas parce qu'on se dit qu'on pourra les faire revivre un jour et en extraire ces milliers de fichiers figés dans le disque dur grillé, des étagères pleines de vinyles des années 80/90, de CD aussi, pire de VHS dead, des sacs de bagnoles Majorette à léguer à l'enfant qui s'en branlera du haut de sa tablette 3D fist la mort, des cartons fermés qu'on n'ose plus ouvrir de peur d'y retrouver des proches cadavrisés en photo, des lettres et des cartes de gens qu'on affirmait aimer pour la vie, de bibelots, de journaux jaunis, d'infos moins essentielles qu'un battement d'ailes de papillon dans ton cul, des boîtes de jeux, du train électrique, du télescope, de la petite télé noir et blanc au cas où, des classeurs de cours, des livres d'Histoire-Géo de 4ème pas jetés parce qu'un petit mot de Noémie la convoitée à l'âge de 14 ans qui a écrit "si j'étais célibataire ce serait avec toi que j'irais", des décorations de Noël en vrac qu'on utilise de toute façon plus les mêmes chaque année, des briquets vides en forme de chibre ou de flingue, de la bâche en plastique qu'on garde pour repeindre le salon quand on aura le temps quand on aura envie mais on n'a jamais le temps et en aucun cas l'envie, des recueils de poèmes écrits au stylo Bic sur du papier d'imprimante ou du papier de boucher des années 90, de la boîte à outils avec tout ce bordel de vis, de clous, de chevilles, d'équerres, de marteaux, de tournevis, de toutes ces choses qui ne servent que deux trois fois sur quatre décennies, du tuyaux de douche, du pommeaux de douche, des torchons sales, des valises qu'on utilise plus parce qu'on n'a plus un rond pour voyager, des produits de nettoyage fossilisés sous une couche de poussière et de crasse...

Léonel Houssam 

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