Les filles se peignent, se font refaire le cul ou les seins
« On
n’ira pas parler de tout ça plus haut. Tu vas juste m’expliquer ce que tu as
ressenti en faisant son affaire à cette fille ». Je fis un effort pour
parler correctement malgré l’hémoglobine, les maux déments répandus dans toute
ma carcasse. « Elle avait des yeux si beaux. Elle avait des mains fines et
moi j’ai toujours rêvé d’une fille aux ongles manucurés. Dans ce patelin de
cons, les femmes se négligent, elles ne font aucun effort, elles font les louves
mouillées, moches, surtout quand elles sont engrossées. Elles se font mettre en
cloque trop tôt ces baltringues pour creuser le nid dans la boue. L’Jura, c’est
ça, c’est peut-être comme ça ailleurs. Alors moi j’ai jamais connu de filles
comme je voulais. Belle, bien peinte qui a des lueurs dans les yeux.
-
Abrège.
-
Je l’ai rencontrée
sur le marché. Tu sais, les premiers jours de l’automne, les gens qui se
renferment dans les manteaux, les messes basses, les conspirations. Elle était
derrière son stand au bout du marché. Ça ressemblait aux plages de Floride qu’on voit à la télé. Là-bas, ils roulent en 4X4 sur le sable, ils font du
body-building et les filles se peignent, se font refaire le cul ou les seins.
Lucie non, mais au moins elle mettait du vernis. J’avais idée d’une fille comme
ça.
-
T’es un malade.
-
Une fille comme ça,
tu la prends un peu dispersée, foutue en l’air par la vie et tu la
retapes ».
Il
se mit à sourire d’une manière vicelarde. Il se vautra un peu plus dans son
fauteuil en me fixant, le regard rêveur. J’avais mal aux côtes. J’avais envie
d’un verre d’eau pour cracher toute la merde qui encombrait ma bouche. Mes
membres tremblaient insensément. J’étais en état de choc. Chiens chimiques me
mordant la carotide, me grignotant l’intérieur de la face. Des teignes gigotant
sous-cutanées… C’était terrible. La mort me soufflait sensuellement dans le
cou.
"Tous
les jours, j'avais rendez-vous avec l'amour... Ça a duré des semaines, des
siècles même si pour toi, ça n'a été que trois jours ". Je me mis à
pleurer devant mon café bouillant. Il sentait mauvais. C'était un jus de
chaussette dégueulasse à priori mais qui avec la salive salopée par le sang et
la bile avait un effet salvateur.
Léonel Houssam
Commentaires