La saveur sucrée de ses lèvres de demi-pute




"Tu me retrouves dans le gros tuyaux du deuxième sous-sol et sois à l'heure. Je ne t'attendrai pas". Légumes chauds et délicieux sur la langue, surtout les carottes. Il savoure bien qu'il eut préféré des frites, des grasses, des cuites dans l'huile bulleuse. L'huître qui lui fait face porte des lunettes Dolce&Gabana. Elle dépose une pièce d'un euro avant de repartir. L'autre s'en est déjà allé. La journée est très avancée. Il a été mis dehors par trois fois. À la quatrième, ils l'embarqueront dans une estafette du SAMU social, direction le bal des pouilleux.

La belle américaine qui fait tourner les têtes, qui laissent les jolies jambes des dames tomber en cascade sur le goudron clair ramolli par le cagnard menaçant. Il est presque midi mais des mains fermes miment le soir tellement il y a de l'empressement. Cette femme a des faux airs de Marilyn Monroe mais en plus pute, façon télévision réalité prison pixélisée, elle arbore ces affreux tatouages sur le corps qui font tâches de merde sur la peau lisse. Une mode qui semble vouée à l'idolâtrie par les contemporains abrutis. Il ne lâche pas sa clope. Le ballet des paparazzi, telle une nuée de mouches à merde, bouffe la légèreté de l'égérie du petit écran. Elle flamboie encore un peu avant de flamber...

La cité des 4000 ou des 100 000, des valises à roulettes et des mains qui tremblaient. Elle avait cette robe fendue sur la jambe droite qui dévoilait une peau presque pure, presque impeccablement épilée. Il n'avait plus vu ce genre de sacrifice depuis deux ans. Sa bouche suintait littéralement la salive. Elle fit un écart, son talon s'enfonçant dans une grille d'aération. Son corps menu s'effondra sur le côté gauche. Elle le fixa. Elle lui brailla quelques insanités: "Qu'est-ce que t'as à m'regarder sale merde de clochard?"

La saveur sucrée de ses lèvres de demi-pute se déposa sur sa gueule de mendiant, de crotte crimée par la pauvreté. C'était beau, et ça ne faisait pas plus de bulles qu'un mourant dans son lit d'escarres. "J'en profite connasse. C'est pas tous les jours que je peux zyeuter une bonne salope". Les paparazzi claquaient l'index sur le déclic de leurs appareils. Les miroirs du ciel métallique renvoyait les flashs multicolores de la supernova qui avalait la Terre. "Oh oui que c'est joli! J'te connais pas! Les muses d'aujourd'hui sont toujours désarticulées dans des lits de deux mètres sur deux avec les draps bien blancs froissés, des mecs aux cannes poilus leur faisant des mamours miteuses dans le cou"...


A suivre...

Léonel Houssam


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