L'écouter lire dans sa tête...





Le nœud coulant de son nez morveux. Je lui demande ce qu’il fait là. Il me répond qui tente de rentrer. Je lui ordonne de reculer. Il ne s’exécute pas. Je l’exécute du regard. Il va finir en viande séchée sous le porche, derrière la maison, là où l’on met tout le bazar. Je n’ai pas appelé la police. Le premier poste est à plus de deux cents kilomètres de chez nous. En pensant aux photos miraculeuses de ma femme, je me dis que j’ai une force que lui, l’homme dérangé, n’a pas. J’ouvre la main, totalement, dans sa direction. Avec un mouvement de zigzague dans l’air, bien parallèle à sa face luisante, je l’efface méthodiquement. Peu à peu, dans le sillon de mon geste, dans cette bande de la largeur de ma main, réapparaît l’horizon voilé par les filaments de brume. Je laisse sa bouche, sa gueule pour la fin. Je la laisse éructer tel du gibier blessé tentant de repousser son bourreau avec des cris pathétiques. Je me plais aussi à laisser la bosse de son sexe dans son jean parce qu’il semble que pour lui, et dans ses propos orduriers, la taille de son pénis a une importance primordiale pour se placer sur l’échelle de l’espèce masculine. Ma mie me regarde faire. Elle sourit. Elle s’occupera de l’autre, la version chef de meute de ce duo… J’efface ce résidu entièrement. Il n’est plus là. La campagne est là. Il est effacé. La nature triomphe. Avant de rentrer, j’observe un tournoyant au-dessus de son point d’impact. Une musaraigne va y passer, ça ne fait aucun doute. La porte d’entrée grince. Il faudra la huiler. Je vais m’allonger auprès de ma moitié et l’écouter lire… C’est tellement envoûtant, hypnotisant, de l’écouter lire dans sa tête…


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