1980 : Robert de Niro, c’est plus un héros...





Je recommence le texte puisque ce fils de pute d'ordinateur vient de sauter et me bousiller ce que j'ai travaillé pendant près d'une heure auparavant. Je ne redis pas, je résume. Mais grosso modo, tu avais « de Niro », c'était un héros, maintenant c'est un vieux con avec des problèmes de vessie, de cœur, qui joue les fortes têtes mais qui n’est en fait qu’un bon gars fort sympathique... Des souvenirs, quand je vivais chez tata en ce temps-là, elle me disait tout le temps, très souvent: « Tu manges pas la peau du saucisson ». Moi je mangeais la peau du saucisson et je regardais mes héros à la télévision. Je ne pensais pas à l'Afrique à cette époque-là et je trouvais ça bien la démocratie, les urnes et les discours de l'abbé Pierre et les chansons de Pierre Perret et les petites tresses des filles mais j'en voulais pas. 
Puis ça a empiré. J'ai fait mime de héros gangster en picolant, en essayant de baiser dès que j'ai pu choper des filles et tout le reste. Et bouffer la peau du saucisson comme j'avais envie. 
T’avais de Niro dans le taxi, qui va dans la foule avec la crête, putain, il déchirait, il te retournait la tête. « Quand je serai plus grand j'irai tuer des députés et je mangerai la peau du saucisson »

Avec un copain, on allait au Maroc, c'était une colline couverte d'une forêt dense derrière chez tata. Là, on torturait toujours un autre copain. On l’attachait à un arbre, on lui donnait des gros coups de pieds dans les couilles et on lui arrachait les cheveux en l'insultant. C’était comme si on était des héros, qu’on avait du pouvoir. Parce que le torturé, c’était un plus petit et plus maigre que nous, mais nous, on savait que c'était un fils de pute, un qui travaillait pour l’URSS qui était une saloperie de communiste des pays de l’est, un polonais ou un hongrois, un truc comme ça. J’étais toujours de Niro, et l'autre c'était Hutch. Il voulait que je m’appelle Starsky mais ça faisait trop polonais ou un truc comme ça, alors je m'appelais Robert de Niro. J'avais du savon, je faisais la crête. Robert, ça faisait vieux français qui picole, mais avec de Niro derrière, ça faisait caïd, chef de bande, ça faisait mec qui maîtrise le flingue et qui fait sauté un déchet de bouffe entre les dents d’un coup de langue.
Avec mon pote, on lui baissait aussi le froc au méchant attaché à l'arbre. Des fois on lui donnait tellement de coups qu'il allait à l'hosto avec ses parents après. Il ne disait rien parce qu'on lui avait dit qu'on le tuerait sinon. Moi le de Niro et Hutch, on aimait bien qu'il pleure bien pendant qu'on bouffait de la peau de saucisson...
«Oh le pauv’URSS de communiste il a pleuré oh! Il fait l’bébé le méchant »
On aimait bien les Etats-Unis, les séries télévisées et leur armée qui nous avait libérés des allemands. On aimait bien aussi les Etats-Unis parce qu'à l'époque il s'agissait du pays où ils avaient inventé la chirurgie esthétique pour devenir beaux. Les américains, ils faisaient l’amour à nos femmes alors que les russes rouges et les nazis, ils les violaient. C’était un peu ça qu’on comprenait des cours d’Histoire. Le pénis USA était une crème douce et vanillée. Celui des cocos et des boches était une lame de rasoir. Hutch et moi on rigolait bien devant le méchant ligoté/bâillonné. Ensuite on descendait de la colline le Maroc avec le méchant plein de sang. On allait chez tata qui disait, faussement sévère: « Mais vous êtes allés trainer où les garnements? Vous êtes tout cradingue... » Nous on lui disait qu'on avait chassé du communiste et ça la faisait rire parce que tonton était communiste...
C'était bien cette époque-là... et Robert de Niro, ben c'était moi... Alors. Je t'en raconterai un autre bout un autre jour.
Extrait de "Robert de Niro n'est plus un héros". Pseudobiographie en cours d'écriture.

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