Où chaque homme adulte dépose un bulletin de foutre
Le choix des armes. Elle a opté pour son vagin, sa prétendue
pureté, l’urne où chaque homme adulte dépose un bulletin de foutre. Et ce
famélique désir qu’elle offre à Halfred
a plutôt l’apparence d’une douleur causée par un chatouillement trop insistant.
« Je ne comprends pas ce que vous me dites. Quel est
votre problème ?
- J’me sens crevée.
- Des envies de suicide ?
- Nan, je sens que je meurs. Je suis bizarre.
- Vous avez une très bonne tension, pas de problème au cœur,
vous me dites n’avoir aucune douleur sauf peut-être là où vous avez pris des
coups. Des coups de qui ?
- De mon mec.
- Vous avez appelé la police pour porter plainte ?
- Y’a plus de police, vous le savez bien. Ils sont tous en
train de faire les poches des passants pour bouffer. Ils obéissent qu’aux riches
des cités-blockhaus.
- Vous faites quoi dans la vie Amanda ?
- J’me débrouille.
- Du travail ?
- Ouais par ci par là.
- C’est-à-dire ?
- Des Messieurs me font travailler.
- Vous vous prostituez ?
- Ouais voilà.
- Vous avez quel âge ?
- Presque 20. Je sais, j’en fais 15. C’est ce qu’ils aiment
les clients.
- Les hommes sont des esthètes.
- Hein ?
- Amanda, vous allez très bien. Il y a du monde qui attend.
Alors vous me devez 40€.
- J’ai pas. J’ai plus. Mon mec prend tout.
- Hum. Tout travail mérite salaire »
Les cheveux blancs tombant sur les épaules se confondent
avec le coton immaculé de sa blouse. Sur son badge fixé sur le cœur, « Docteur
Laroche » est écrit en lettres d’or sur un fond noir. Sa jambe droite est
déficiente. Il boîte légèrement, ce qu’elle n’avait pas remarqué à son entrée
dans le cabinet. En s’arrêtant devant elle, il retient un renvoi. Une odeur d’ail
mêlée à celle du tabac se répand dans ce mètre-carré de promiscuité.
« Il faut payer »
Sa voix a changé, plus rauque, plus chevrotante, emplie d’excitation…
Amanda baisse le regard, écarte le bas de la blouse blanche et baisse la braguette
du pantalon à pinces noir. Du slip blanc à la forte odeur d’urine décomposée
jaillit une verge courte, épaisse et tordue vaguement gonflée. Les testicules
énormes pendent telles des noix fermes étirant un sac de peau blanc rosé semé
de poils longs bouclés blancs. Malgré l’odeur, elle fourre la queue directement
dans sa bouche et s’attèle rapidement à la tâche… Un tic-tac léger rythme l’instant,
celui d’une grosse montre en or blanc qui pendouille à son poignet gauche. La
douleur est vive lorsqu’il lui agrippe les cheveux. L’orgasme est rapide, le
sperme est abondant. « Avale »
Avant de sortir, il lui embrasse la joue de manière
paternelle et douce. Il lui pose deux boîtes d’aspirine dans la main : « Tu
as été parfaite. Je te donne mon diagnostic : tu es enceinte… »
Dans la salle d’attente, la foule est dense, tousse, râle
dans un silence de mort. La plus grande partie des malades qui attend est
debout. Les chaises manquent, l’air est étouffant. Elle se presse de sortir de
l’immense immeuble à demi-abandonné pour rejoindre le 4x4. Lorsqu’elle s’assoit,
elle évite de regarder Halfred dans les yeux. Le ciel est sombre, des nuages
noirs et gris moutonneux s’entrechoquent à grande vitesse. L’orage risque d’être
une tornade… Les tropiques sont désormais bien installés dans ce qui fut le
continent tempéré.
« Alors ?
-
Rien. Une espèce de gastro »
Sa tête est emportée par le vertige… En allumant une clope,
elle se dit : « Ils sont trois cents pères d’un enfant »
Extrait de « Reine-Mère ». Nouvelle en cours d’écriture.
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