La mort des libraires
Pan dans vos gueules les
libraires et autres crevards de l'édition qui chialent sur leur sort et se
battent contre tous ceux qu'ils qualifient de tueurs du livre. À force de
verrouiller les écrivains libres et indépendants, voilà que ce sont les
méchantes multinationales américaines qui offrent la seule alternative à
beaucoup. Paradoxe ? Posez-vous les bonnes questions. À force de dresser des
barbelés autour de vous et de standardiser la littérature, vous ne faites que
vous flinguer chers "experts" du monde littéraire. Vous ne voulez que
livrer de la pâte molle à un lectorat paresseux et gavé comme une oie. Je ne
suis sélectionné à aucun prix mais mes livres s'écoulent à plusieurs centaines
d'exemplaires parfois sans qu'un seul libraire traditionnel ait daigné mettre
un seul exemplaire dans ses rayons. La fainéantise intellectuelle combinée à
une forme de sectarisme et de petitesse d'esprit ont tué les libraires
indépendants comme les librairies de chaîne. Je suis un écrivain très sombre
qui soulève la merde que l'Humanité produit chaque heure, chaque minute, chaque
seconde et les refus que je reçois ne sont dictés que par le désir de bloquer
mon message. J'ai eu de nombreux retours étayés d'éditeurs qui souhaitaient
tous que je bride mon message et que je standardise la structure de mes romans
tout en me reconnaissant un véritable style, du "talent" et une rage.
Ils ne veulent pas froisser leur lectorat et pire parfois ils ne veulent pas
que les lecteurs aient accès à mon travail par pure posture morale et politique.
Certains m'ont clairement dit qu'ils ne souhaitaient pas que des lecteurs
lisent ces "autres" vérités qu'ils refusent d'admettre et de
supporter. Ils veulent du glauque mais pas trop, ils veulent de l'incisif mais
pas du tranchant, de l'explosif. Ils ne veulent pas que la littérature soit
AUSSI une arme, un piège ou pire un moyen de ravager la structure cadenassée de
notre société. Ils ne veulent pas risquer de subir les tenants de l'ordre
littéraire. Ils ne veulent pas choquer les maîtres gloutons de l'art.
Alors qu'ils crèvent dans leur
jus, qu'ils cessent de pleurer sur leur chiffre d'affaire qui s'érode. Ils
n'ont pas besoin d'écrivains destructeurs comme moi ? Et bien il faut qu'ils
comprennent que je les laisse dans leur marécage poisseux qui s'assèche à vue
d'œil. Ils sont rares ceux tentent de sortir de l'ornière mais la morale
générale les rappelle à leur devoir : "Ne publiez pas de ces nouveaux
Céline ou Genet, de toute façon, sans jamais les avoir lus, nous avons la
conviction qu'ils n'écrivent que de la merde".
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