Corona Jacta Est

Photo: Yentel



Vous vous rappelez les bonimenteurs/alchimistes qui allaient de village en village ? Désormais, ils vont de Twitter en Facebook, de WhatsApp en Instagram... Chacun peut offrir son élixir de vérité, chacun peut se répandre. Chacun peut détailler sa petite journée de confiné. Du pas grand-chose. Du sport sur la moquette du salon, des petits plats cuisinés, des crises de nerf, des nuits molles. Ceux-là même qui crachaient sur la paresse –hypothétique – des chômeurs en sont désormais les promoteurs. Baignés dans le son pourri des visio-webcams diffusé à longueur de journée par les chaînes de désinformation continue, ils se concentrent sur le remplissage de leur attestation de sortie, ils se lavent les mains pour mieux applaudir les personnels soignants au balcon à 20 heures pétante.

Ils ne le savent pas encore, mais ils sont morts, ravagés, déjà emportés par la lame de fond de 2020-Année Zéro. L’effondrement complet de la civilisation ultra-libérale dans laquelle nous vivions tous aura des conséquences plus dramatiques et meurtrières que la pandémie elle-même. Je ne suis pas un prédicateur de malheur. Ma parole a autant de valeur qu’un caillou dans un tas de gravats. Je serai lessivé également, avec peut-être beaucoup plus de capacités de résilience que ceux qui se sont nourris sans cesse d’illusions et de biens de consommation. Beaucoup moins que ceux qui tendent la main, que ceux qui sont sortis de dix ans de traitements, que ceux qui souffrent de maladies chroniques, que ceux qui ont connu la famine ou la guerre.

Pour un misanthrope, ce qui arrive est la concrétisation de son rêve absolu. Confinement puis évaporation sur une à deux décennies de toute une espèce qui s’est comportée comme un virus, laminant l’intégralité de la nature qui le nourrissait, la domptant pour ensuite l’asphyxier jusqu’à la mort. L’Humanité est un virus mutant qui a peu à peu envahi tout l’organisme terrestre, proliférant à une vitesse de plus en plus exponentielle au point de ne laisser plus un centimètre-carré de la planète libre de sa présence. L’Humanité est une pneumonie sévère pour les poumons que sont les forêts, les océans. Il y a peu, les forêts amazoniennes et australiennes étaient ravagées du fait de l’action humaine. Les banquises, les glaciers sont en phase de frondaison incontrôlable. Les espèces animales et végétales, terrestres et maritimes sont en voie d’extinction… L’Humanité, virus hors-de-contrôle, a bouffé tout l’organisme qui lui permettait de se développer… L’Humanité se rêve martienne, lunaire pour échapper à son sort… Mais tout comme le covid-19, quand tous ceux qui devront mourir mourront, il ne sera plus rien, disparaîtra ou mutera encore jusqu’à ce qu’il n’y ait plus un seul être humain vivant sur cette planète. Des îlots d’Humanité survivront, revenus à l’âge de pierre, bouffés par les prédateurs animaux encore vivants, mais surtout bouffés par la montée des eaux et asphyxiés par les phases de canicule aux chaleurs létales, achevés par les ouragans, les tremblements de terre, les sécheresses, les ultimes guerres intestines, de nouvelles épidémies, le jaillissement de virus sévères, de microbes voraces, de bactéries affamées…

A suivre…

Docteur Zonzon, le rabat-tristesse du confinement.

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