Fast World, slow dépression

Leonel Houssam


La fast-food, la fast-fashion, la fast-pensée quoi… c’est la fast-dépression.

La fast-oppression, la fast-injonction, la fast-doxa, la fast-foi…

Il n’y a qu’une chose qui vaille dans ce gros moteur à explosion qu’on appelle le techno-capitalisme : c’est la vitesse.

La religion du vite, de l’approximatif, de la philosophie à la taille d’un tweet, au format d’un réel…

Vite, vite, vite.

La fast-nation, avec l’obligation de se sentir patriote d’une nation qui s’est construite, détruite, reconstruite, recomposée, décomposée — tel un organisme foireux qui aurait la même totalité qu’un corps.

Fast-anarchie, fast-politique, fast fast fast… tout est fast, jusqu’à la surchauffe.

Les fast-RIP, les fast-infos qui fastent les autres fast-infos. La fast-analyse.

L’informatique, Internet, la numérisation de toute chose, la “démocratisation” de l’accès à des petits terminaux omniscients, omnipotents…

Les IA qui dispensent de chercher, de se perdre, de raisonner, de douter, de prouver… Fast. Trop fast.

Fast-éducation, fast-médecine, mort foudroyante de l’esprit, le cerveau réduit à l’état d’utilitaire du présent.

La fast-immédiateté, les fast-raccourcis historiques, la fast-spiritualité…

Tout n’est que vitesse — de vitesse qui doit aller de plus en plus vite.

Ça suit, ça suit pas, peu importe.

Il faut que tu sois fast, que tu trouves le fast-sens à ta fast-vie.

La fast-négociation, histoire de tuer la négociation.

La fast-illusion d’un monde meilleur.

La fast-nostalgie : c’était mieux avant, on avait des Simca sur la Nationale 7 et des pique-niques saucisson-pinard.

Fast-cétait-mieux-avant, fast-changement de sexe, fast-tatouages…

Fast, c’est fat, c’est lourd, c’est chiant, c’est démentiel.

Les IA accélèrent la fast-société pour gagner fastement beaucoup d’argent, pour fastement tomber plus vite, pour fastement briller à l’instant Fast-T.

Fast-gains de productivité, fast-contrôle de tous et de chacun, fast-censure, fast-névroses, oui…

On mourait de famine, de guerres et de catastrophes — on en meurt encore, mais fast !

Même la procrastination est devenue fast ! Remettre à la minute d'après ce qu'on pourrait faire en cette minute ! 

Fast-info sur les milliers de morts dans telle guerre, fast-breaking-news sur le cyclone catégorie 5 qui a rasé tels quartiers pauvres, tels pays ravagés…

Fast-bourse, fast-cracks, fast-optimisme, fast-démocratie, slow-dictature.

Parce que le slow, c’est réservé à la fast-élite.

Fast-baise et slow-solitude.

Fast-management, fast-performance, et slow-déclassement.

Fast-dépression et slow-répartition des richesses.

Fast-économie et slow-précarité.

Dans le fast-monde, chaque jour, certains s’élèvent et résistent pour une slow-vie, un temps de slow-moments conviviaux, de slow-sensualité, de slow-journées.

La slow-misère harcelée par la fast-fortune.

S’il n’y a plus qu’un combat à mener, c’est celui d’un monde slow contre un monde fast.

C’est impératif — et urgent — de stopper le fast pour réhabiliter le slow.

Et tout le monde se sentira fastement mieux. La fast-culture face au slow-underground. 

N'est-il pas temps d'entrer dans la slow-résistance et faire en sorte que le fast-collapse s'achève dans la slow-extinction ?

Je vous laisse le temps d'y réfléchir...

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