Retour de lecture: "Opération Shylock" de Philip Roth




Quelques mots sur la lecture que je viens d'achever. On ne présente plus Philip Roth. Enfin, si, peut-être mais je vous laisse le loisir d'aller "wikipédier" ce grand écrivain américain pour en savoir plus.

Je ne suis pas "tombé" sur ce roman. C'est un ami éditeur qui me l'a conseillé l'année dernière après avoir lu la seconde version de mon manuscrit en cours (je viens d'en écrire une 3e version). Il m'avait dit que mon roman "doit exister et être publié" tout en me conseillant sur celui-ci pour l'améliorer. Cet ami fut l'un des plus grands éditeurs français à mes yeux. Et il le fut (et l'est encore puisque les plus grands auteurs qu'il a mis sur le devant de la scène sont toujours actifs pour la plus grande partie d'entre eux) parce qu'il sut découvrir des œuvres que j'ai adorées bien avant de l'avoir rencontré. Il le fut et l'est encore parce qu'il sait me "prendre", me donner les bons conseils, parce qu'il sait faire avec mon caractère bouillonnant, mon esprit trop sonique, mon tempérament parfois impulsif, souvent tortueux voire torturé. Il sait me dire les "choses" comme il faut, sans me froisser, sans jouer un duel avec moi. Car lorsqu'on veut être frontal avec moi, dans l'opposition complète, je me lance dans le combat avec tout mon être, souvent plus à mes dépends qu'à ceux de mon adversaire.

Il me conseilla donc et me demanda de lire ce roman. "Tu verras, après les soixante-soixante-dix premières pages qui sont assez pénibles à lire, Philip Roth t'embarquera ensuite dans un récit complètement fou". J'ai débuté la lecture 9-10 mois après l'avoir acheté.

Effectivement, à la lecture des cinquante premières pages, j'ai calé.

Le personnage principal n'est autre que l'auteur lui-même. Plongé dans une dépression sans fin, il tire sa vie comme un fardeau. Jusqu'au jour où il a connaissance de l'existence de son double, un homonyme tout d'abord puis un jumeaux à la vue des photos de celui-ci dans les journaux. Son état dépressif le plonge d'abord dans le désarroi, le pousse à délirer jusqu'à ce qu'il réalise peu à peu que ce double existe bel et bien.

Ce dernier se fait connaître en Israël et dans la presse israélienne par son discours et son combat: le "diasporisme", c'est-à-dire le retour des Ashkénazes vivant en Israël vers leur terre "d'avant Hitler": l'Europe. Cette idée folle rencontre de nombreux adeptes mais aussi des opposants féroces. C'est alors que Philip Roth, l'auteur, décide de partir pour Jérusalem, à la rencontre de son alter ego (imposteur?).

Je vous laisse ensuite savourer cette épopée intérieure qui mêle les questionnements essentiels sur l'existence mais aussi les débats sur l'existence de l'Etat d'Israël, des juifs à l'ère de l'existence de cet Etat, de la diaspora juive américaine, sur le sort des palestiniens. C'est fort, très fort, ça percute tous les clichés, ça dézingue les clivages, ça pulvérise les clichés, ça anéantit les facilités philosophiques et politiques sur le Moyen-Orient. Philip Roth n'a peur de rien. Il donne la parole à tout le monde, à chaque vérité et chacune de ces vérités en percute une autre et encore une autre dans un tourbillon narratif assez dingue une fois qu'on en achève la lecture.

La littérature est un art majeur, mais il est un art majeur uniquement parce qu'un roman tel que celui-ci existe.

Commentaires

Articles les plus consultés